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Photo du rédacteurMarc THOMAS

La Seine n'est pas la Cène

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Des chrétiens crient au blasphème parce qu’ils ont regardé Sequana, la déesse de la Seine, à travers le prisme du tableau de la Cène de Léonard de Vinci. Comme quoi nous lisons tous la réalité à travers les lunettes de nos interprétations et de nos pré-requis.

 

Mais comment avoir osé accuser de blasphème Thomas Jolly et son équipe, créateurs de ce spectacle, sans même se demander quelle avait été leur intention dans ce tableau ? Juger et condamner sans donner la parole à ceux qu’on accuse n’est ni démocratique, ni évangélique !

 

Ce dimanche 28 juillet au matin, j’ai écouté un interview de Thomas Jolly et  de Daphné Bürki sur BFMTV, et je vous invite à écouter sans préjugé ce qu’ils disent tous les deux de cette fresque.



Thomas Jolly

"Ce n’est pas mon inspiration (la Cène chrétienne). Il y a Dyonisos (Philippe Katerine peint en bleu) qui arrive sur cette table. Il est là parce qu’il est le Dieu de la fête dans la mythologie grecque. Le dieu du vin qui est un des fleurons de la France. Et le père de Sequana, la déesse qui est reliée au fleuve, la Seine. L’idée était de faire une fête païenne reliée aux dieux de l’Olympe.

 

Sur un pont qui enjambe la Seine, ce tableau du banquet du dieu Olympe, présidé par sa fille Sequana qui a donné son nom au fleuve parisien. Raccourci artistique étonnant qui relie ainsi les Jeux Olympiques de Paris à la mythologie grecque, qui a donné naissance à la philosophie de l’olympisme dans la Grèce Antique.

 

Thomas Jolly a voulu mettre en relation des évènements très différents, comme le mélange tellement improbable de la Garde Républicaine et de Aya Kamura devant l’Institut de France, tellement redouté et finalement très apprécié… Ici il évoque de façon décalée l’olympisme de la mythologie grecque, les JO de Paris, et peut-être la Cène du Jeudi Saint, non pour les tourner en dérision, mais pour les mettre en dialogue. Peut-être pour réconcilier ceux qui croient trouver du divin dans un ailleurs qui bouleverse les codes, et ceux qui cherchent du divin dans l’Evangile…

 

D’ailleurs écoutez ce qu’en dit Thomas Jolly lui-même :

Vous ne trouverez jamais chez moi une volonté de moquerie et de dénigrer qui que ce soit. J’ai voulu faire une cérémonie qui répare, qui réconcilie, et aussi qui réaffirme les valeurs de notre République, liberté-égalité-fraternité, et absolument pas d’aller moquer qui que ce soit.

 

Par contre, si on utilise notre travail pour regénérer derrière ce moment d’union à nouveau de la division, de la haine, et qu’elle continue de progresser alors qu’on a, je crois, mis un peu de paix les uns avec les autres et constaté que quand on est ensemble avec toutes nos différences on peut faire des choses grandes, belles et émouvantes, alors ce serait très dommage."

 

Daphné Bürki

Ce qu’on a essayé de faire, c’est d’être le plus inclusifs possible, de montrer toutes les identités, dans cette ville de l’amour qu’est Paris… Tout ce qu’on a essayé d’insuffler ce soir-là continue à se propager, à élever. Il a raison Thomas quand il parle de « réparation » : le but c’était d’apaiser. C’est le principe de l’olympisme et de cette cérémonie. Il devrait y avoir une trêve ce soir-là, mais il devrait y avoir une trêve tout court. On est plutôt sur un message de paix, et ceux qui ont besoin de sur-commenter, ou de se projeter dans un endroit qui n’est pas, je suis désolé pour eux, mais ce n’est pas le cas.

 

Thomas Jolly

Je crois que ça nous a fait du bien, après des mois et des années ! Il y a eu le Covid, il y a eu des séquences politiques difficiles, mais en réalité ce pays est beau : il y a des gens qui sont tous différents, pouvant aimer, vivre, librement, ils sont beaux et belles : c’est marrant, on est plus nombreux je crois à vouloir vivre bien ensemble, mais on est moins bruyants.

 

LE LANGAGE DE L’EVANGILE

 

En écoutant Thomas et Daphné, je me demande qui a le plus le langage de l’Evangile : les détracteurs de la fresque qui crient au blasphème ? ou les auteurs quand ils disent leur intention et surtout quand ils disent ce qu’ils proposaient de vivre aux spectateurs ?

 

LES LANGAGES DES ARTS

 

Je me demande aussi si les personnes qui crient très vite au blasphème sont ouvertes aux langages originaux de l’art, souvent décalés et interpellant pour provoquer une ouverture à d’autres visions de la réalité.

 

J’ai été moi-même mal à l’aise devant la fresque des Drag Queens, et je sais que je ne suis pas le seul. Pas mal à l’aise en raison du parallèle fait avec le Cène du Jeudi Saint : je n’ai pas du tout fait le lien à ce moment-là ! Mal à l’aise parce que ces modes d’expressions ne sont pas les miens. Mal à l’aise parce le transgenre sexuel m’est inconnu et que j’ai bien du mal à le comprendre. Je découvre donc mes propres limites à l’inclusion… est-ce une raison pour juger ce que je n’aime pas ?

 

Cependant, ces arts et ces cultures transgenre font aujourd’hui partie de notre monde. Un monde à accueillir, même si je ne suis jamais obligé de souscrire à tout ce qu’il propose.

 

 INCARNER L’ÉVANGILE DANS LES CULTURES DU MONDE

 

Imaginons même que les auteurs de cette fresque aient voulu faire un lien « subliminal » entre le banquet Querr autour du Dieu Olympe et la Cène du Jeudi Saint…

 

S’il en était ainsi, la mission des chrétiens est toujours la même : s’incarner au cœur du monde tel qu’il est, en disant parfois son désaccord, mais jamais pour seulement dénoncer, mais d’abord pour le transformer et lui donner un sens nouveau de paix, de fraternité, de salut (on n’est pas loin de l’intention décrite par Thomas Jolly ci-dessus)

 

Quelques exemples de la Bible et de la vie chrétienne qui rejoignent et transforment les cultures humaines :

 

Quand les religions païennes demandaient des sacrifices humains pour honorer leurs dieux, Abraham découvre que le Dieu d’amour ne demande pas le sacrifice de son fils.

 

Quand le peuple sorti de l’esclavage retourne à son infidélité, Dieu ne condamne pas :

Livre d’Osée 11, 7-9 : Mon peuple s’accroche à son infidélité ; on l’appelle vers le haut ; aucun ne s’élève.

Vais-je t’abandonner, Éphraïm, et te livrer, Israël ? Vais-je t’abandonner comme Adma, et te rendre comme Seboïm ? Non ! Mon cœur se retourne contre moi ; en même temps, mes entrailles frémissent.

Je n’agirai pas selon l’ardeur de ma colère, je ne détruirai plus Israël, car moi, je suis Dieu, et non pas homme : au milieu de vous je suis le Dieu saint, et je ne viens pas pour exterminer.

 

Je pense aux scribes et aux pharisiens qui amènent à Jésus une femme surprise en situation d’adultère et qui rappellent que Moïse a ordonné de lapider ces femmes-là. A ceux là qui accusent, Jésus répond : Celui d’entre vous qui est sans péché, qu’il soit le premier à lui jeter une pierre. Jésus, transformant la Loi de Moïse, dit à cette femme : Moi non plus, je ne te condamne pas. Va, et désormais ne pèche plus…. A bon entendeur, salut !!!

 

La fête de Noël est née sur la base d’une fête païenne du retour de la lumière au moment du solstice d’hiver… et c’est pour cela qu’on fête Noël le 25 décembre, donnant à cette fête de la lumière un sens nouveau avec Jésus Lumière des Nations.

 

Et si nous inversions nos réactions à propos de ce banquet de Querr : au lieu d’y dénoncer dérision et blasphème qui n’existent parfois que dans nos sensibilités effarouchées, nous aurions peut-être pu entendre Philippe Katerine expliquer ensuite sa quasi-nudité sur scène par le fait que les athlètes des premiers Jeux Olympiques grecs étaient nus, et que seul l’homme nu ne peut dissimuler une arme qu’il porte et les turpitudes qu’il cache… J’y entends un écho de la nudité innocente et qui n’avait rien à cacher du Paradis terrestre… Beau message, certes décalé, mais pas si loin de l’Evangile !

 


En ne cédant pas à ce qui nous a choqué, nous aurions pu aussi révéler des signes de salut : une croyance païenne des dieux de l’Olympe, une liturgie païenne des transgenres d’aujourd’hui en quête de reconnaissance… Et si nous accueillions ceux qui cherchent à s’évader du quotidien par la drogue, le sexe et la violence, comme Jésus accueillait tous les souffrants de son temps, si nous entendions leurs quêtes au lieu de les dénoncer ? Si nous proposions d’éclairer le banquet de l’Olympe et des Drag Queens par le banquet de la Cène du Jeudi Saint où l’amour est partagé en nourriture et boisson pour sauver nos vies d’aujourd’hui de toute fausse évasion ?

 

Alors nous annoncerions ainsi la Bonne Nouvelle d’un partage INCLUSIF de la grâce de Dieu pour toutes et tous, quelles que soient ses désespoirs et ses dérives.


SACREMENT DU SALUT

 


La cérémonie d’ouverture des Jeux Olympiques est saluée dans le monde entier pour sa créativité artistique novatrice, mais aussi pour son message de paix, de reconnaissance et de dialogue entre les différences, d’accueil des cultures et des périodes de l’histoire… Au risque de vous choquer, j’ai envie de vous dire que cette cérémonie avait quelque chose de sacramentel. Le sacrement se définit comme un signe visible et efficace qui réalise aujourd’hui ce qu’il annonce depuis toujours. Sous une pluie battante, symbole de la période difficile et déchirée que le monde traverse, cette cérémonie a montré visiblement l’espoir de paix, de partage, de fête que tant d’hommes et de femmes espèrent. Cette cérémonie a réuni Mémoire, Communion populaire et mise en action du peuple rassemblé.

 

Mémoire d’abord en rendant présente l’histoire de France à travers ses tableaux, l’histoire de ses cultures à travers ces artistes si divers, l’histoire de ses sportifs de toutes les époques récentes pour allumer la flamme. En langage chrétien, relier le passé et le rendre présent au cœur de l’aujourd’hui, cela s’appelle « faire mémoire »…

 

Communion populaire ensuite de tous ceux qui s’écharpent dans la vie quotidienne, une sorte d’assemblée populaire (sens étymologique du mont Ecclesia) réunie dans la joie, l’espoir, la communion, l’émerveillement, les applaudissements… Une vraie louange !

 

Peuple en action enfin passant par le métro, les toits de la Ville, les bâtiments historiques, la Seine, la Tour Eiffel, le rassemblement des peuples du monde… Peuple applaudissant, criant, s’identifiant aux différents acteurs, peuple où des inconnus se côtoyaient et se parlaient… Un peuple en action, c’est le sens étymologique du mot liturgie !

 


Cérémonie sacrement d’espoir, de paix, de partage, de bonheur… Je souhaiterais que toutes les liturgies chrétiennes donnent de tels signes incarnés dans le quotidien des hommes, pour être sacrement, c’est-à-dire signe visible et efficace pour le monde d’un salut qui s’accomplit aujourd’hui !

 

Dans la forte pluie parisienne qui n’a pas empêché la fête, nous avons vécu samedi soir un signe symbolique et « sacramentel » de ce que les français et le monde sont appelés à vivre au milieu des pluies et des orages de ce temps.


L'hymne à l'amour d'Edith Piaf, déclamé par Céline Dion, en était le bouquet final !

Regardez, écoutez encore : https://www.youtube.com/watch?v=D7FMMjqKvaM 


Marc THOMAS    -    parole-semee@orange.fr 

 

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