Une foi qui respire
J’ai parfois l’impression que la foi chrétienne s’est recroquevillée sur une religion raidie et désincarnée.
J’ai parfois l’impression que les pratiques religieuses des chrétiens s’adressent à un Dieu qui n’est pas celui de l’Evangile : à un Dieu qu’il faudrait amadouer et dont il faudrait s’attirer les bonnes grâces…
J’ai parfois l’impression que les chrétiens cherchent à gagner leur salut à coup de pratiques rituelles et religieuses plutôt que d’accueillir dans la joie et la reconnaissance un amour offert gratuitement et sans contrepartie.
La foi chrétienne n’est pas d’abord une religion comme une autre.
Les religions païennes cherchent à amadouer un Dieu qui fait peur.
D’autres spiritualités cherchent à améliorer le cœur de l’homme.
Les chrétiens croient en un Dieu qui nous cherche en premier,
avec un amour inconditionnel pour chacun de nous tels que nous sommes.
Ecoutez ce texte du livre d’Osée, en nous demandant : est-ce bien en ce Dieu là que nous croyons ?
Oui, j’ai aimé Israël dès son enfance, et, pour le faire sortir d’Égypte, j’ai appelé mon fils. Quand je l’ai appelé, il s’est éloigné pour sacrifier aux Baals et brûler des offrandes aux idoles.
C’est moi qui lui apprenais à marcher, en le soutenant de mes bras, et il n’a pas compris que je venais à son secours. Je le guidais avec humanité, par des liens d’amour ; je le traitais comme un nourrisson qu’on soulève tout contre sa joue ; je me penchais vers lui pour le faire manger. Mais ils ont refusé de revenir à moi : vais-je les livrer au châtiment ? (…)
Mon peuple s’accroche à son infidélité ; on l’appelle vers le haut ; aucun ne s’élève. Vais-je t’abandonner, Éphraïm, et te livrer, Israël ? Vais-je t’abandonner comme Adma, et te rendre comme Seboïm ?
Non ! Mon cœur se retourne contre moi ; en même temps, mes entrailles frémissent. Je n’agirai pas selon l’ardeur de ma colère, je ne détruirai plus Israël, car moi, je suis Dieu, et non pas homme : au milieu de vous je suis le Dieu saint, et je ne viens pas pour exterminer.
(Osée 11, 1-9)
Quand j’entends Osée parler de ce Dieu amoureux, je me demande comment se fait-il qu’aujourd’hui des chrétiens aient encore peur d’un Dieu qui condamne ?
Si c’est sa nature de nous aimer inconditionnellement, pourquoi passons-nous tant de temps à l’implorer de veiller sur nous, comme si nous en doutions pourquoi passons-nous si peu de temps à l’en remercier ?
Pourquoi nous infligeons nous tant de pénitences en doutant que nous serons sauvés un jour, alors que nous sommes déjà sauvés par ce Père de l’Enfant Prodigue qui attend amoureusement son fils sur le pas de sa porte, alors que ce fils est en train de faire les 400 coups ?
Quand je regarde nos pratiques religieuses, je crains parfois que nous nous soyons trompés de Dieu !
Et que nous en soyons encore aux pratiques païennes de celles et ceux qui ont peur d’un Dieu vengeur…
Quand nous réduisons le christianisme à UNE RELIGION
Nous cherchons Dieu au Ciel, bien loin au-dessus de nous…
Nous multiplions les pratiques rituelles dans les églises…
Nous avons peur d’un Dieu qui condamne…
C’est l’homme qui cherche un Dieu souvent inaccessible.
Nous cherchons à amadouer Dieu par nos prières ou nos actes de pénitences…
Les religions : une relation de peur devant des forces non maîtrisables...
… alors qu’il s’agit d’UNE FOI A VIVRE
Nous croyons en un Dieu incarné dans notre monde : « Et moi je suis avec vous tous les jours jusqu’à la fin du monde. » (Mt 28, 20)
C’est Dieu qui cherche l’homme et vient à sa rencontre, s’enfouissant dans l’humanité.
- Croire en un Dieu qui donne sa vie par amour
- Croire en soi, croire en l’homme « temple de Dieu », sauvé
- Croire en l’autre, frère et sœur en communion fraternelle
Croire : une foi, même mot que confiance…
La foi chrétienne : une relation de confiance
Le christianisme se distingue de toutes les religions par l’incarnation :
il tourne nos regards non vers le ciel, mais vers l’homme et vers le monde où Dieu est incarné
quand nous réduisons le christianisme à UNE DOCTRINE ou UN DOGME
Des vérités éternelles sans cesse réaffirmées.
Des mystères à accepter sans toujours les comprendre.
Des commandements de Dieu et de l’Eglise à respecter.
Des enseignements parfois pris comme « parole d’Evangile ».
… alors qu’il s’agit d’UN AMOUR A VIVRE
« Mon commandement, le voici : Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés. » (Jn 15, 12)
« Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme et de tout ton esprit. Voilà le grand, le premier commandement. Et le second lui est semblable : Tu aimeras ton prochain comme toi-même. De ces deux commandements dépend toute la Loi, ainsi que les Prophètes. »(Mt 22, 37-40)
Dans le christianisme, l’amour de Dieu pour l’homme, de l’homme pour Dieu, et l’amour fraternel
sont les seules et uniques vérités et les seuls commandements, critères de tous les autres
Aimer à perdre la raison, aimer à n'en savoir que dire,
à n'avoir que toi d'horizon, et ne connaître de saison
que par la douleur du partir : aimer à perdre la raison !
quand nous réduisons le christianisme à DES PRATIQUES RITUELLES
Pratiquer, c’est aller à la messe le dimanche...
Prier le chapelet, adorer le Saint Sacrement…
Confondre le sacré et le sacrement…
Trouver Dieu dans la louange…
Croire que les églises sont les lieux privilégiés pour rencontrer Dieu.
… alors qu’il s’agit de PRATIQUER L’AMOUR FRATERNEL
Au Jugement dernier : « J’avais faim vous m’avez donné à manger… Chaque fois que vous l’avez fait à l’un de ces plus petits de mes frères, c’est à moi que vous l’avez fait. » (Mt 25)
« Au soir de cette vie, vous serez jugés sur l'amour. » (St Jean de la Croix)
En christianisme, la prière n’est pas d’abord demande pour que Dieu agisse,
mais action de grâces pour les merveilles accomplies au cœur du monde.
En Jésus, Dieu rencontre l’homme dans sa vie et pas dans les temples :
il va demeurer chez Zachée, il va dîner chez les pécheurs,
il va à la rencontre des malades et des foules…
Les célébrations sacramentelles sont des signes visibles et efficaces
du salut à l’œuvre aujourd’hui dans le monde tel qu’il est.
Quand nous réduisons L’EGLISE à une HIERARCHIE
Le pape, les évêques, les prêtres et les fidèles, comme une pyramide.
Le cléricalisme qui remet toutes les décisions entrent les mains des mêmes
L’appellation « Père » à destination des prêtres
L’évangile plus souvent prêché par les prêtres que partagé entre chrétiens.
… alors qu’il s’agit du PEUPLE DE DIEU
- Le Concile Vatican 2 a restauré la primauté du Peuple des baptisés dans lequel s’exercent différents services (ministères).
- Le Pape François dénonce « une manière déviante de concevoir l’autorité dans l’Église – si commune dans nombre de communautés dans lesquelles se sont vérifiés des abus sexuels, des abus de pouvoir et de conscience – comme l’est le cléricalisme, cette attitude qui « annule non seulement la personnalité des chrétiens, mais tend également à diminuer et à sous-évaluer la grâce baptismale que l’Esprit Saint a placée dans le cœur de notre peuple » (Lettre du 20 août 2018).
- « Pour vous, ne vous faites pas donner le titre de Rabbi, car vous n’avez qu’un seul maître pour vous enseigner, et vous êtes tous frères. Ne donnez à personne sur terre le nom de père, car vous n’avez qu’un seul Père, celui qui est aux cieux. Ne vous faites pas non plus donner le titre de maîtres, car vous n’avez qu’un seul maître, le Christ. Le plus grand parmi vous sera votre serviteur. » (Mt 23, 8-11)
La hiérarchie ecclésiale est une pyramide inversée où les ministères soutiennent et coordonnent la mission et la sacramentalité du Peuple des baptisés.
« Peuple de frères, peuple du partage, porte l’Evangile et la paix de Dieu »
Marc THOMAS
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